“Une direction juridique moderne ne peut pas être autre chose qu’un business partner de nos jours”

Entretien avec Eric Amar, General Counsel, Bolloré Transport & Logistics

Quel est votre parcours professionnel ?

Après quelques années dans la presse ( Groupe de Jean-Louis Servan Schreiber), j’ai intégré, en 1990, le Groupe Bolloré, que j’ai eu la chance d’accompagner dans sa croissance, à divers postes de juriste, puis de Directeur Juridique International, et enfin de Directeur Juridique de Bolloré Transport & Logistics, qui compte actuellement environ 35.000 personnes. Notre Direction Juridique comprend une vingtaine de membres à Paris, mais aussi et surtout plus de 100 juristes à l’étranger, dont une grande partie en Afrique.

Quelle est la journée type d’un directeur juridique ?

Tous les jours sont différents, et heureusement. En synthèse, trois types de tâches :

  • Management des équipes, et assistance dans leurs dossiers
  • Organisation et stratégie : moyens, outils, relations avec les autres fonctions, relations avec les prestataires, etc.
  • Dossiers traités en propre.

Ces journées, à l’instar, heureusement , de nombreux de mes collègues DJ et juristes, sont très variées, et la plupart du temps pleines de surprises, élément qui me plait beaucoup.

En quoi la direction juridique est un business partner de l’entreprise ? Un ou des exemples concrets ?

Une DJ moderne ne peut pas être autre chose qu’un business partner de nos jours. Mais n’oublions pas son autre mission, plus « régalienne », une mission de contrôle et de sauvegarde des intérêts de long terme, stratégiques, de l’entreprise au sens large, ses salariés, actionnaires, Conseil d’Administration.

Le côté business partner, concrètement, se révèle dans le cadre de négociations commerciales, contrats clients ou fournisseurs. Il se révèle également lors d’interactions avec les dirigeants sur des sujets plus stratégiques : acquisition de sociétés, gros contentieux, gestion de crises.

Peut-on attribuer des KPI à une direction juridique ?

Bien entendu, à condition que ces KPI soient multiples, et ne se limitent pas à un délai de réponse.

Quelles transformations impactent aujourd’hui le service juridique ?

La transformation digitale, mais celle-ci est, peut-être à tort, la plus visible . Le digital est fondamental, mais ce n’est qu’un outil, au service, justement, des transformations, sociétale, de relations humaines, de gestion des diversités, de tous ordres. Et n’oublions pas, évidemment, l’interaction accrue avec les fonctions Compliance, Communication, RSE.

Comment les prenez-vous en compte dans votre fonction de manager juridique ?

En privilégiant une direction juridique ouverte sur l’entreprise, et sur le monde. J’encourage les juristes à « sortir », à se déplacer en agences, chez nos clients internes ou externes.

Comment se caractérise la transformation digitale de votre direction juridique ?

Par l’ajout d’outils innovants évidemment, mais là encore , ces outils ne sont qu’un moyen, et doivent être adaptés à la stratégie de l’entreprise, et à celle de sa DJ.

Pourquoi est-ce important de mesurer et engager cette transformation ?

Cette mesure est fondamentale, à condition qu’elle ait deux directions :

        1. Un benchmark avec nos collègues juristes d’autres entreprises. Ce benchmark a pu être indirectement effectué grâce à une participation à l’index de l’EDHEC, qui compare les niveaux de digitalisation des DJ. Cette coopération, toujours en cours, apporte beaucoup, mais elle doit ensuite être validée par le second élément :
        2. La transformation, dans son esprit et ses outils, doit surtout être liée à la culture de l’entreprise, ses enjeux culturels, géographiques, et y « coller » autant que possible. Sans ce second élément, pas de transformation efficace à mon sens.

En savoir sur l’index de transformation digitale des directions juridiques proposé par EDHEC Augmented Law Institute